Ujjayi Pranayama

Les Yogis identifient plusieurs causes aux problèmes de santé dont souffrent les êtres humains. Certains troubles ont ainsi une origine lointaine et sont la conséquence d’actes négatifs antérieurs.  Le remède véritable consistera donc à purifier l’esprit de ses souillures.

La seconde cause, plus proche, est d’ordre énergétique : une circulation incorrecte de l’énergie vitale dans le corps subtil entrainera à moyen terme un trouble de la santé. Les pratiques du Pranayama (Maîtrise du souffle subtil) fournissent des remèdes très puissants et variés pour traiter ces difficultés.
Enfin, les troubles de la santé peuvent avoir une cause matérielle très proche et résulter de conditions de vie néfaste : mauvaise alimentation, pollution, contamination par une bactérie, un virus… Si la médecine traditionnelle indienne a développé depuis longtemps des remèdes, la puissance des traitements déployés par la médecine occidentale moderne est universellement reconnue.
Comme on le perçoit aisément, ces trois approches se complètent et s’enrichissent mutuellement. La première orientation est à la fois spirituelle et psychologique, la seconde énergétique et la dernière matérielle.
Dans la mesure où l’être humain est composé d’un esprit, d’un corps énergétique et d’un corps physique, une approche globale du soin nécessiterait de n’exclure aucune de ces trois dimensions, qui sont d’ailleurs en étroite relation les unes avec les autres.
Ujjayi constitue l’une des techniques énergétiques les plus surprenantes. En dépit de son caractère extrêmement efficace beaucoup d’Occidentaux rechignent à la mettre en œuvre, sans doute en raison d’un blocage psychologique : Ujjayi fait produire un son rauque avec la gorge que d’aucuns peuvent trouver disgracieux, voire incongru. Mais les Yogis se soucient assez peu des convenances sociales, si leur santé est à ce prix.
Selon l’étymologie la plus fréquemment retenue, Ujjayi signifie « victorieux » en sanskrit, ce qui laisse en suspens la question naturelle : « victorieux, mais de quoi ? ». Pour les Yogis, Ujjayi pranayama permet de triompher de la maladie, de la vieillesse et de la mort. Cela signifie concrètement que, grâce à la puissance thérapeutique de cette technique, de nombreuses maladies vont pouvoir être mises à distance, le vieillissement du corps sera retardé et la vie de l’adepte sera ainsi prolongée au-delà des limites fréquemment admises.
Il est bien évident que si cet exercice se trouve mis en œuvre dans le cadre d’une pratique spirituelle authentique, comme c’est traditionnellement le cas, les vertus d‘Ujjayi Pranayama se trouveront décuplées.
Ujjayi pranayama constitue donc une des pratiques de longue vie les plus célèbres et les plus efficaces.

1.      Une pratique confidentielle


Ujjayi ne peut être mise en œuvre de façon sécurisée qu’à condition de respecter scrupuleusement plusieurs principes.
Tout d’abord, le pratiquant doit être inspiré par une motivation véritablement pure. Au minimum, les adeptes du Yoga cherchent à se libérer de leurs difficultés et à atteindre un excellent état de santé. Les pratiquants authentiques aspirent même à développer de grandes capacités pour aider de façon puissante et désintéressée tous les êtres vivants. Par conséquent, toute personne qui serait inspirée par une motivation futile (accroitre sa capacité respiratoire pour faire de l’apnée), ou franchement mauvaise (développer des pouvoirs pour nuire à autrui), en subirait immanquablement des conséquences rigoureuses.
Compte tenu de la puissance d’ Ujjay Pranayama, les instructions de pratique doivent être respectées rigoureusement. Elles sont heureusement très faciles à comprendre et à mémoriser.
Comme il s’agit d’une pratique de maitrise du souffle subtil, ses bienfaits vont se déployer essentiellement à moyen terme. La mise en œuvre d’Ujjayi, comme nous le verrons, ne peut être que progressive et requiert donc un peu de patience. Les personnes pressées auront grand intérêt à se détourner de cet exercice.

2.      Une mise en œuvre sécurisée


Comme toutes les techniques de Pranayama, Ujjayi se pratique habituellement en posture méditative. Cependant, le Hatha Yoga Pradipika et Swami Shivananda relèvent qu’elle peut être accomplie debout, soit en position statique, soit en marchant. Dans ces deux cas, Jalandhara bandha ne sera pas placé (cf . Commentaire du HYP).
On veillera à ce que la colonne vertébrale reste bien droite pour permettre la circulation correcte des souffles subtils. Si la colonne fait l’objet d’une déformation (scoliose), on fera du mieux possible : on redressera le dos et on se représentera mentalement la colonne parfaitement verticale.
Trois phases de la pratique doivent être dissociées :

. l’inspiration


Il s’agit de la phase la plus spectaculaire, mais non de la plus importante.
Ujjayi Pranayama est immédiatement reconnaissable au son qu’il produit. L’air est inspiré lentement, régulièrement, par les deux narines jusqu’à ce que les poumons soient remplis complètement. Cette inspiration se fait en obturant pour partie la glotte qui est le passage qu’emprunte l’air inspiré après son entrée dans l’arrière-gorge (pharynx), juste avant sa descente dans le larynx. Le rétrécissement du passage de l’air induit par Ujjayi produit une vibration qui provoque ce bruit si caractéristique.
D’ailleurs, en posant délicatement les doigts d’une main sur le bas de la gorge, quelques centimètres sous le menton, on peut aisément sentir que c’est en cet endroit que la vibration se trouve émise.
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Pour réaliser à coup sûr l’inspiration correcte, imaginez que vous inspirez directement par le bas de la gorge, comme si vous aviez subi une trachéotomie. C’est certain, présenté ainsi, c’est peu engageant mais, cela me permet immédiatement de pratiquer de façon juste ! Si cela vous convient mieux vous pouvez penser à cette réflexion d’une personne qui m’entendait pratiquer : « Mais, c’est la respiration de Dark Vaddor ! »
Certains produiront le son d’une mobylette pétaradant, d’autres croiront entendre le son d’un animal marin, du genre « baleine en détresse » : ne vous laissez pas impressionner. Si c’est « bizarre », c’est à coup sûr juste ! 

. la rétention de souffle


Une fois les poumons pleins, on installe les trois bandhas (verrous) qui orientent le flux énergétique de façon particulière : jalandhara en déglutissant et abaissant le menton, uddiyana en contactant les abdominaux et muladhara en contractant vigoureusement le périnée. L’air retenu se trouve ainsi enfermé et puissamment canalisé.
Cette phase est la plus importante et doit être accomplie avec vigilance. La rétention du souffle ne doit, en effet, pas être molle, indolente, accomplie sans effort car les résultats seraient alors superficiels, presqu’ inexistants. Cependant, l’effort produit ne doit pas être brutal, violent, excessif. La rétention doit ainsi, à chaque instant, être maintenue sans jamais excéder les capacités de l’adepte.
Pour être certain de pratiquer correctement il faut relâcher l’air quand on perçoit que c’est nécessaire. Pour cela, une approche progressive est indispensable. Ainsi, quand on découvre la pratique on ne retient l’air que quelques secondes parce que notre organisme nous enjoint d’expirer. Quand on est un peu plus entrainé, on doit toujours pratiquer avec la vigilance du débutant : la rétention dure sans doute un peu plus longtemps, mais on expire toujours au moment précis où l’on ressent que cela est nécessaire. Il faut donc absolument éviter de « vouloir faire un chrono » ! Les amateurs de compétition doivent se détourner immédiatement d’Ujjayyi, leur esprit n’est pas prêt. Ujjayyi ne peut être abordée qu’avec la patience et l’application qui commande à la maitrise d’un éléphant sauvage. Le Prana qui siège dans le cœur peut être maitrisé par le Yogi à la condition de s’appliquer avec un effort maitrisé. Sans quoi le cœur sera brisé !

. l’expiration


On obture la narine droite avec le pouce droit et l’on expire à gauche. L’expiration doit être accomplie lentement. Elle devrait durer deux fois plus longtemps que l'inspiration. Cette indication est fondamentale car toute expiration rapide amènerait le pratiquant à perdre de sa force.
L’expiration doit, en outre, être régulière, menée sans à-coup, sur un tempo uniforme.
Elle doit, enfin, être complète, c’est-à-dire conduire à un vidage total des poumons.
Une fois ce cycle accompli, on recommence.
Accomplie cinq minutes par jour, cette pratique est excellente et procure de grands bienfaits.

3.      Des résultats étonnants


Ce Pranayama permet tout d’abord d’équilibrer les trois éléments constitutifs de notre corps selon la médecine traditionnelle indienne. En particulier Ujjayi Pranayama traite les maladies qui procèdent d’un déséquilibre de l’élément feu et de l’élément air.
Ujjayyi Pranayama élimine les différentes affections du système respiratoire, non seulement les troubles concernant la zone des fosses nasales, du pharynx et du larynx, mais aussi les maladies pulmonaires. Ujjayi sera ainsi particulièrement précieux pour traiter les allergies respiratoires dues à la présence d’un composant particulier dans l’air, ainsi que l’asthme, la rhinopharyngite, l’angine, la bronchiolite, le rhume.
Par ailleurs, Ujjayi « abolit les défauts des nadis »(* HYR ,53). Cette pratique permet ainsi de corriger la structure des canaux à l’intérieur desquels l’énergie circule. En effet, avec l’âge, le corps énergétique, tout comme le corps physique, se dégradent. La mise en œuvre d’Ujjayyi permet ainsi de lui conserver son intégrité.
Certains troubles mentaux se trouvent grandement soulagés : état dépressif, anxiété, crise de nerfs.
Le feu digestif est déployé, ce qui permet une excellente assimilation des aliments, tant en ce qui concerne leurs constituants chimiques que le Prana qu’ils recèlent. Ceci se traduit extérieurement, selon Swami Shivananda, par l’obtention d’une belle couleur de peau, d’un très joli teint.

conclusion


Ujjayi Pranayama s’adresse aux pratiquants authentiques, seuls inspirés par les objectifs élevés du Yoga. Sa mise en œuvre requiert patience et application. Mais ses vertus sont étonnantes : elles changeront profondément, et pour le meilleur, votre vie.
Christian Ledain
 
Bibliographie :
André van Lysebeth, Pranayama, Flammarion,  chapitre sur Ujjayi , pages-221-228
Swami Shivananda, La science du Pranayama, Centre International de Yoga Védanta, P.78
Hatha Yoga Pradipika, édition Fayard, IIe partie, versets 51 à 53

La non-violence, essence du Yoga


La non-violence constitue l’alpha et l’oméga de la pratique du Yoga. L’alpha parce que tout commence par elle : il est impossible à quiconque d’aborder véritablement cette discipline sans souhaiter se libérer de toute forme de violence. Elle en constitue aussi l’oméga car, au fil des ans, le pratiquant parvient à intégrer cette valeur à un point tel qu’elle sous-tend chacune de ses actions. Il n’a alors de cesse, en toutes circonstances, d’accomplir avec aisance le bien d’autrui et son bien propre.

 

En parlant ainsi de l’esprit du Yoga, on se trouve bien loin de la simple gymnastique à laquelle certains, un peu trop pressés, voudraient réduire cette discipline.

 

Certes, les postures ont leur importance, et les passionnés d’exercices physiques, de maitrise corporelle, seront amplement rassasiés. Mais toute la technique du Yoga est mise au service d’une philosophie, d’une conception de l’être humain et de son épanouissement. Et cette finalité élevée transcende complètement la dimension corporelle de la discipline. Si l’on oubliait un seul moment que le Yoga constitue un des sat darshana, un des six systèmes de l’hindouisme qui se propose de libérer l’être humain de la souffrance, on passerait aussitôt à côté de l’essence de cette pratique.

 

Patanjali a exposé dans les Yoga sutra, aphorismes sur le Yoga, les composantes de l’Ashtanga Yoga, la discipline en huit membres. Pour comprendre ce dont il est question il suffit de faire un très léger détour. Si nous cherchons, par exemple, à définir ce qu’est un éléphant, nous dirons : « c’est un animal qui possède une trompe, une queue, quatre pattes et deux défenses ». Nous définissons ainsi l’éléphant en nommant les parties constitutives de son corps. Appliquant ce principe au Yoga, Patanjali en a défini les huit composantes, ou anga (« membres » en sanskrit). Ainsi, pas plus que l’éléphant n’est constitué uniquement d’une défense et d’une trompe, on ne saurait réduire le Yoga aux postures et à la maitrise du souffle.

 

Patanjali a pris soin d’exposer ces huit anga selon un certain ordre : d’abord Yama et Niyama, puis Asana (postures), Pranayama (maitrise du souffle), Pratyahara (le retrait des sens), Dharana (concentration), Dhyana (méditation) et, enfin, Samadhi (extase).

 

Yama se trouve traditionnellement traduit par « réfrènements » : l’adepte s’empêche ainsi d’accomplir un certain nombre d’actions nuisibles. De son côté, Niyama désigne « les prescriptions », soit un ensemble d’actions positives que l’adepte cultive.

 

Yama et Niyama englobent ainsi des principes moraux qui sont la base même du Yoga. Ce sont les fondements sans lesquels la discipline n’existe tout simplement pas.

 

Certains pourraient alors prendre le Yoga pour une discipline bien austère puisqu’ elle exige de tout candidat un esprit tourné vers le bien. Mais il faut comprendre qu’une telle exigence est éminemment protectrice : toute personne qui s’engagerait dans la pratique en se croyant exempt de tout engament moral irait au-devant de graves déconvenues. Certains, méprisant cette invitation, y ont laissé jusqu’à leur santé mentale.

 

Au premier rang des réfrènements Patanjali fait figurer Ahimsa, la non-violence. Une telle place suffit à nous révéler l’importance primordiale que revêt cette valeur pour le Yoga.

 

Il est donc essentiel de préciser maintenant le sens de cette notion (I). Puis, nous indiquerons comment concrètement actualiser la non-violence lors d’une séance de Yoga (II).



1.    Le Yogi respecte la non-violence dans ses différentes acceptions.

 

L’adepte du Yoga met en œuvre dans sa pratique une conception large de l’Ahimsa.

 

·       S’abstenir de tuer

 

Tout d’abord, le Yogi respecte la définition la plus élémentaire de la non-violence: s’abstenir de tuer. Il renonce à tuer, non seulement ses congénères, mais aussi les animaux. Il témoigne aussi un grand respect envers les forêts, les cours d’eau, sans lesquels la vie ne serait pas possible. Il est le premier des défenseurs de l’environnement car il sait que les humains et les animaux y puisent leurs moyens d’existence.

 

De tels choix de vie peuvent nous paraitre surprenants. Nous consommons de la viande, et cela nous parait donc normal de faire tuer des animaux. Pourtant, à bien y réfléchir, aucun animal ne va de son plein gré à l’abattoir, et si on lui en laisse la possibilité, il s’en échappe immédiatement. Pour quelle raison irions-nous donc imposer une telle souffrance à un autre être, alors que nous ne voudrions pas subir un tel destin ?

 

Ce principe de non-violence marque un progrès profond dans l’histoire de l’humanité. C’est son affirmation qui a conduit le brahmanisme à renoncer dans ses rituels au sacrifice d’être vivants.  Le sacrifice est désormais conçu comme un renoncement intérieur effectué par le pratiquant.

 

Renoncer volontairement à tuer n’est pas toujours un choix facile à effectuer pour un homme. Certaines cultures valorisent la violence et, être capable de tuer, constitue alors une composante même de la virilité. Le cow-boy est bien la figure emblématique d’une telle conception, mais elle n’en est pas la seule. Dans toute culture machiste, un homme se doit d’être dur, destructeur pour lui-même et pour ceux qui l’entourent.

 

Or, être humain, pleinement humain, c’est précisément renoncer totalement à la violence. Ne dit-on pas, d’ailleurs, d’un conquérant qu’il fait preuve d’humanité quand il accorde sa grâce à ses adversaires vaincus et leur laisse la vie sauve ? Et il faut beaucoup plus de courage pour renoncer à la violence que pour y céder car c’est souvent rompre avec les valeurs de son milieu, quitter le clan, contredire les valeurs de sa famille d’origine.

 

Le Yogi ne se contente pas de respecter cette conception étroite de la non-violence, s’abstenir de tuer. Dans son rejet de toute forme de violence, il renonce plus largement à causer du tort à autrui. Il s’abstient ainsi de créer de la souffrance.

 

·       Renoncer à faire du mal à autrui

 

Cette décision se fonde sur un raisonnement très simple.

 

Les Yogis pensent que toutes leurs actions engendrent des conséquences de même nature que l’acte initial. Ainsi, leurs actes positifs seront immanquablement sources de bonheur pour eux-mêmes. Inversement, ils sont convaincus que tous leurs actes négatifs se retourneront finalement contre eux et seront à l’origine de souffrances futures auxquelles ils ne pourront manquer d’échapper. Ce principe, appelé loi du karma, régit le destin des êtres vivants, aussi surement que l’attraction universelle gouverne les corps physiques. En toute logique, les Yogis, qui veulent se libérer définitivement de la souffrance, s’abstiennent d’accomplir les actes qui généreraient une telle souffrance. Ils renoncent donc à créer tout tort à autrui.

 

·       Rechercher le bien d’autrui

 

Elargissant encore ce principe, les Yogis vont plus loin : aspirant à un bonheur durable, ils génèrent incessamment, constamment, des actes excellents destinés au bien de tous les êtres. Ils savent qu’ils en recueilleront, à court ou à long terme, les très puissants bénéfices.

 

Les adeptes du Yoga dépassent ainsi la conception purement négative de la non-violence - s’abstenir de tuer et de nuire à autrui - pour s’ouvrir à une conception réellement positive - réaliser en toute circonstance le bien d’autrui et le leur propre.

 

On ne saurait donc pratiquer correctement le Yoga sans pratiquer constamment la non-violence.



2.    L’expression de cette non-violence dans la pratique

 

Examinons maintenant comment, à l’occasion d’une séance de Yoga, nous mettons en œuvre concrètement cette non-violence.

 

·       Méditer sur la bienveillance

 

Comme nous l’avons indiqué, Yama et Nyama constituent les deux premières phases du Yoga exposées par Patanjali.

 

En début de séance nous commençons par couper court à nos préoccupations ordinaires afin de ne pas être parasités par elles. Nous détournons ainsi le cours habituel de nos pensées car elles sont imprégnées de perturbations mentales. Pour générer un esprit bienveillant à l’égard de soi et de tous les êtres, nous nous remémorons durant quelques instants les bienfaits que l’on souhaite obtenir de la pratique : un excellent état de santé, une vie longue et heureuse, la réussite dans nos projets, un esprit fertile et paisible.

 

On pense aussi que les bienfaits qui découlent d’un esprit serein vont nous permettre d’être plus justes dans la relation à autrui. On pratique donc pour soi, mais aussi pour son conjoint, ses enfants, ses collègues, ses voisins, et finalement pour le monde entier qui a tellement besoin de paix et d’harmonie.

 

On sait pouvoir atteindre ces résultats car de grands Yogis nous ont précédé sur notre chemin. Aussi nous savons, avec une entière certitude, que nos vœux ne sont ni de vaines chimères, ni des rêveries enfantines : c’est un engagement, une orientation murement réfléchie.

 

La lecture de biographies d’êtres tels que Ramana Maharshi, Ma Ananda Moyi, Gandhi, Ramakrishna, swami Vivékananda, Swami Shivananda, est très inspirante et peut nous aider à ouvrir plus largement notre esprit.

 

Cette première phase, durant laquelle nous méditons sur la bienveillance, va imprégner complètement tout le déroulé de notre séance. Tout ce que nous allons accomplir, si minime soit-il, sera excellent car orienté dans la bonne direction.

 

·       Actualiser la non-violence dans la prise des postures

 

Inspiré par ce sentiment d’amour universel, l’adepte va alors pouvoir mettre en œuvre de façon juste le troisième « membre » de la pratique du Yoga : les asanas (postures). Ces postures sont très nombreuses, et comprennent de multiples variantes. Aussi, bien souvent, ne met on en œuvre qu’une quinzaine d’asanas à l’occasion d’un cours.

 

Ce qui est déterminant, pour recueillir des bienfaits, c’est l’attitude intérieure que l’on génère.

 

Laissant son esprit au repos, le Yogi reconnait la nature véritable de ces enchainements corporels : au-delà de leur aspect physique, ils constituent avant tout des supports pour développer la concentration.

 

L’adepte aborde toute posture avec ses capacités physiques et mentales du moment. Il prend le temps de demeurer stable dans chacune d’elles, juste le temps qu’il le peut. Ainsi, au début, on demeurera quelques instants, quelques secondes, car le corps et l’esprit seront vite fatigués. Et puis, on prolongera un peu plus la tenue des postures, sans esprit de compétition.

 

Nous saurons spontanément à quel moment quitter la posture. Se poser la question :« combien de temps dois-je demeurer dans telle asana ? », n’a pas vraiment de sens car c’est établir une césure artificielle entre soi et la posture. A chaque instant nous actualisons la posture, nous la vivons pleinement.

 

Un pratiquant assidu constatera sans doute a postériori qu’il demeure une à deux minutes dans chaque posture car il n’est pas interdit de réfléchir sur sa pratique. Cependant, cette réflexion n’est menée qu’après, ou bien avant la séance, mais jamais pendant. Durant la pratique nous nous ouvrons pleinement au ressenti, nous sommes totalement recueillis dans l’instant présent, libres à l’égard de toute pensée.

 

Bien sûr, développer une attitude bienveillante envers soi-même n’est pas toujours chose facile. Pour nombre d’entre nous, il s’agit d’un entrainement, d’une attitude patiemment cultivée dont nous ressentons l’impérieuse nécessité. Certaines personnes ont pu intégrer durant leur enfance le message selon lequel « pour progresser, il faut que ce soit dur ! » Et ces personnes ont alors tendance à se rudoyer, à se maltraiter, à transgresser leurs limites. Pour elles, le Yoga constitue un merveilleux remède.

 

Personnellement, cela fait trente-cinq ans que je pratique. Six mois après ma découverte du Yoga, les problèmes de santé que j’enchainais à répétition se sont estompés, puis arrêtés. Il m’est depuis arrivé d’avoir la grippe, mais cela ne m’a jamais empêché d’assurer mes cours. Et les bilans de santé que j’ai fait réaliser de temps à autre, par sécurité, n’ont rien révélé de particulier. Cet excellent état de santé, je le dois complètement au Yoga et à son enseignement non-violent. Et je rends profondément hommage à cette longue lignée de maitres qui transmettent, de génération en génération, ce savoir ancestral merveilleux.

 

CONCLUSION

 

La non-violence apparait ainsi comme le point de départ et l’aboutissement de la pratique du Yoga.

 

Au fil d’un long chemin, l’adepte passe du souhait de se libérer de la violence à la mise en œuvre concrète de cette valeur dans chacun de ses actes.

 

C’est cette intégration qui est fondamentale et qui va marquer une réelle progression dans la pratique. Que vous puissiez demeurer un quart d’heure la tête en bas, comme une chauve-souris, dans Kapalasana, ou une heure entière dans la posture du cobra royal (Bhujangasana), n’a pas grande importance.

 

Mais si vous vous sentez plus heureux et si vous concourez à soulager la souffrance du monde, alors là, vous êtes un pratiquant authentique.

 

Christian Ledain

professeur de la Fédération Française de Hatha Yoga